Catastrophes !
Bouh…bouh…bouh…snif…les hexagonaux pleurent à chaudes
larmes ; ils ne seront pas près d’oublier cette catastrophe affreuse, si
j’ose ce pléonasme.
C’est normal direz-vous : ces pauvres gens victimes de
torrents de boue dévastateurs qui, en quelques petites minutes, ont emporté
tout sur leur passage. Ces survivants, nus, hébétés, tentant de comprendre ce
qu’il leur arrive, sans y parvenir vraiment tant la réalité est insupportable.
Ils ont tout perdu. Leur maison dévastée. La maison qu’ils ont
bâtie à force de travail, d’économies, synonymes de sacrifices s’étendant sur
les trois-quarts de leur vie. Disparus les photos des petits qu’ils n’ont pas
vus depuis des années; l’affreux vase gagné sur la foire, mais conservé en tant que témoin de leur rencontre
amoureuse ; les meubles qui constituant leur chez-soi et devenus leurs
amis ; la voiture de pompier, la poupée princesse, objets de tant
d’amour. Pire, disparus des enfants, des femmes, des maris, des voisins, tant
d’êtres chers enlevés à jamais à leur affection.
Ils ont perdu leur passé, leur présent et pour beaucoup,
leur futur. Certains seront relogés, mais pour la plupart, cela sera vécu
plutôt comme une déportation. Combien de temps leur faudra-t-il pour apprivoiser
leur nouveau domicile, s’il y arrive un jour ?
Voilà de quoi s’apitoyer et se sentir solidaire de ces gens
à qui les éléments ont pris leurs vies, sinon leur vie.
Et bien non, vous n’y êtes pas ! Les hexagonaux ne
pleurent pas pour cet incident mineur ! Ils pleurent parce qu’on a cassé
leur jouet ! Une magnifique équipe de foot, en or, toute neuve !
En fait, personne n’aurait osé détruire un jouet de tel
prix : c’est le jouet qui s’est cassé tout seul !
Jouet mécanique qu’on avait mal remonté, ou dont ont avait
trop forcé le ressort : et pouiff, plus d’équipe ! Balayée avec
toutes les horreurs de la guerre.
Voilà pourquoi les hexagonaux pleurent.
Aussi, comment pouvaient-ils croire qu’on pouvait mettre en
péril un tel objet de collection ! Les joueurs, si on peut les appeler comme
cela, se demandaient bien ce qu’ils étaient venus faire sur un terrain aussi
hostile. Les tirer de leur palace pour leur faire jouer à la baballe
constituait un crime de lèse-majesté.
Moi, allergique au foot, et donc ayant gardé tout mon
sang-froid, je suggérerais que le défilé
triomphal sur les champs Elysées soit maintenu, mais qu’à la place des ovations,
les supporters envoient des tomates, bien mûres, pour ne blesser que
l’amour-propre, ou ce qu’il en reste.
Pleurez donc, hexagonaux, et si cela vous permettait
d’abandonner vos idoles frivoles marioles sans auréoles portées sur la
gaudriole, vos veaux d’or en quelque sorte, pour vous tourner vers d’autres
valeurs, celles qui ont fait la France… et les Français, vous serez tous
gagnant ! Enfin.
Et ayez une pensée pour les victimes des intempéries. Merci
pour eux.